Mohammed Laksaci

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Mohammed Laksaci

Gouverneur de la Banque Centrale d’Algérie (2001-2016)
Algérie, politique monétaire et dépendance des ressources naturelles
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Venue

Bibliothèque de l'Alcazar

Bibliothèque de l'Alcazar

58 cours Belsunce
13001 Marseille

Date(s)
Tuesday, December 6 2016| 2:00pm to 3:45pm
Contact(s)

Yves Doazan: yves.doazan[at]univ-amu.fr

Abstract

Discutant : Frédéric Dufourt, Aix-Marseille Université, AMSE

La conférence traitera du rôle joué par la politique monétaire dans la mise en œuvre des programmes de stabilisation et d’ajustement structurel au cours des années 1990. Sa nouvelle orientation a-t-elle permis d’absorber l’excès structurel de liquidité sur le marché monétaire durant la période 2002 à 2014 afin de maintenir l’inflation sous contrôle ?

La chute des prix du pétrole

Les ressources naturelles, essentiellement les hydrocarbures dont les prix sont volatils, ont joué et continuent de jouer un rôle primordial dans l’économie algérienne, dans la mesure où les revenus générés par l’exploitation de ces ressources constituent l’essentiel des recettes d’exportation du pays et une part substantielle des revenus budgétaires.

Au cours des années 1970 et 1980, le financement des investissements planifiés a reposé dans une large mesure sur les ressources de la sphère budgétaire liées aux hydrocarbures. Ces deux décennies se sont caractérisées par une forte monétisation de l'économie, alors que la politique monétaire était confinée à un rôle passif en contexte de répression financière. La chute des prix du pétrole en 1986 a révélé les limites d’un tel paradigme ainsi que l’ampleur des déséquilibres macroéconomiques.

Sous l’effet de la chute du prix du pétrole en 1986, la détérioration rapide de la situation de la balance des paiements extérieurs et le déséquilibre des finances publiques ont nécessité la mise en oeuvre de programmes de stabilisation et d’ajustement structurel au cours des années 1990. Après le premier train de mesures de réforme économique engagé en 1988 et 1989, la réforme monétaire mise en oeuvre à partir de l’année 1990 a représenté un important ancrage pour mener à bien la stabilisation macroéconomique et la sortie graduelle du paradigme de répression financière. Les résultats appréciables au terme de la période d’ajustement (1994 – 1998) au cours de laquelle les politiques monétaire et de change ont joué un rôle majeur, ont permis de faire face aux effets de la chute du prix du pétrole intervenue en 1998-1999.

Résorber l'excès de liquidité

Soutenues par la stérilisation d’une partie du surcroît de ressources budgétaires issu des hydrocarbures à travers l’accumulation d’épargnes budgétaires dans le fonds de régulation des recettes (fonds de stabilisation), la politique monétaire prudente a permis de gérer l’excès structurel de liquidité sur le marché monétaire durant la période 2002 à 2014. Au cours de cette période, la conduite active de la politique monétaire au moyen d’instruments pertinents de résorption de l’excès de liquidité a largement contribué à contenir les effets inflationnistes du surcroît de ressources issues des hydrocarbures. Les performances en matière de stabilité monétaire ont conduit à la réforme du cadre de politique monétaire en 2010 qui institue l’objectif explicite d’inflation, concomitamment à celui de stabilité financière. Tout en poursuivant l’objectif de stabilité des prix, la Banque d’Algérie veille à la stabilité financière et à la sécurité des systèmes des paiements.

Si les “coussins de sécurité” (accumulation des réserves de change et d’épargnes budgétaires dans le fonds de stabilisation) constitués entre 2000 et 2008 ont largement permis de faire face au choc exerne de 2009, intervenu en pleine crise financière et économique mondiale, la chute des prix du pétrole à partir de mi-2014 révèle l’acuité de la vunérabilté de l’économie algérienne à toute contraction des ressources d’hydrocarbures. En dépit de l’ajustement du taux de change pour faire face à ce choc externe, l’érosion rapide des ressources du fonds de stabilisation et des réserves de change traduit notamment le fait que la consolidation budgétaire n’a été que faiblement engagé en 2015. La contraction de la liquidité bancaire à partir de 2015, qui est plus soutenue en 2016, justifie la réactivation au cours du second semestre 2016 du rôle de la Banque d’Algérie en tant que préteur en dernier ressort.

La Banque Centrale d'Algérie et le risque d'inflation

En injectant des liquidités dans le système bancaire après plus de quinze années aucours desquelles elle n’avait pas eu à jouer son rôle de préteur en dernier ressort, la Banque d’Algérie devra continuer à veiller à la concrétisation de l’objectif d’inflation en situation de risques à la hausse liés à la persistance du choc externe. Dans une telle situation de baisse des termes de l’échange, la politique monétaire devra mettre davantage l’accent à partir de 2017 sur la nécessité de limiter l’inflation. Le nécessaire ajustement budgétaire graduel à partir de 2017 accompagné par un effort de recouvrement des révenus d’impôts hors hydrocarbures devra étre appuyé par la mise en oeuvre de réformes structurelles à mème de stimuler l’investissement du secteur privé et l’offre de biens et services productifs. Cela aiderait à préserver une marge de manoeuvre relative pour la politique monétaire, pour ce qui est du rôle crutial qu’elle doit continuer de jouer en matière de stabilisation macroéconomique.

Compte tenu de la dépendance de l’économie algérienne à l’égard des ressouces du secteur des hydrocarbures et du risque d’épuisement des ressources du fonds de stabilisation, la poursuite de la politique de flexibilité du taux de change contribuera à éttayer la conduite de la politique monétaire, en situation de faible endettement en devises.

La communication traitera, dans un premier temps, du rôle important joué par la politique monétaire dans la mise en oeuvre des programmes de stabilisation et d’ajustement structurel au cours des années 1990, suite aux déséquilibres des comptes extérieurs et des finances publiques liés à la chute des prix du pétrole en 1986. A la lumière de la consolidation de la stabilité macrofinancière à partir de début des années 2000 soutenue par une gestion prudente du surcoît de ressources issu des hydrocarbures, l’exposé abordera la nouvelle orientation de la politique monétaire qui a permis d’absorber l’excès structurel de liquidité durant la période 2002 à 2014 et de maintenir l’inflation sous contrôle. Enfin, les opérations de politique monétaire seront examinées à travers l’évolution des principaux postes du bilan de la Banque d’Algérie.

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Docteur en sciences économiques de l’Université Catholique de Louvain (1985), Belgique, Mohammed Laksaci a été maître de conférences et président du Conseil scientifique de l’Ecole Supérieure de Commerce d’Alger (1986 – 1990). Après le poste de directeur général des études (1990 – 1997) puis Vice-Gouverneur (1997 – 2001), il a été Gouverneur de la Banque d’Algérie de juin 2001 à mai 2016.

Avec la collaboration de la Bibliothèque de l'Alcazar et le soutien du magazine Objectif Méditerranée .